vendredi, octobre 07, 2005

Ames sensibles s'abstenir

Je pense que parfois il faut avoir le courage de prendre ses responsabilités et accepter de casser un mythe. Oui, je dois le dire maintenant car j’aurais trop peur qu’il y ait tromperie sur la marchandise, je me lance, c’est dur, c’est énorme, c’est la révélation du siècle. Je vais le dire en anglais, c’est plus facile, l’intensité émotionnelle sera atténuée, du moins l’espérai-je : I am addict. Oui, c’est épouvantable à avouer mais je suis sous l’emprise de produits stupéfiants d’origine humaine depuis l’âge de 8 ans.
J’ai tout essayé : des cures de désintoxication les plus sordides à celles pilotées par la médecine herself. Mais, rien n’y a jamais fait, les périodes de recul n’ont jamais duré plus de 6 mois, je pense que je suis perdue, je ne m’en sortirais jamais. Je me BOUFFE LES ONGLES, depuis 24 ans. Le constat est terriblement humiliant. On m’a tout fait : les vernis amers, que je finissais par adorer, les réflexions idiotes du genre « tu auras une crise d’appendicite », chouette de beaux médecins à mon chevet, tu parles, je les attends encore et mon appendice ventrale se porte comme un charme. Ah et j’allais oublier les supers réflexions : « mais c’est pas beau pour une fille ». Premièrement, je ne vois pas en quoi le sexe a un intérêt dans la question, c’est moche, des moignons de doigts. Vous imaginez le jour du mariage, la tête de l’époux quand la fiancé, nippée en meringue, sort de ses gants de dentelles des illusions d’ongles. Elégant ! Comme si je ne le savais pas qu’en plus c’est moche.
Le pire c’est qu’à force je m’y suis habituée, et je me trouve ridicule avec des ongles longs, c’est comme pour les talons hauts, féminité mal assumée nuit forcément à la santé … Ceux qui n’ont jamais goûté de ce fruit défendu m’en connaissent ni l’aliénation ni le plaisir, on est jamais seul, toujours un ongle à porter de main pour se rassurer, pour se venger, pour se martyriser, pour se rendre intéressant. Charlemagne parfois, après que je l’ai bassiné des semaines sur le refrain du « t’as vu comme ils sont beaux mes ongles en ce moment », ne peut s’empêcher au premier faux pas, dans un élan mesquin dont ce sexe a le secret de dire « arrêtes de te ronger les ongles ». Si un jour, vous apprenez que j’ai attenté à ses jours, il n’y aura pas de vaisselle non faite ou de radio trop intensive sous roche, il y aura une réflexion sur ces bouts de doigts pour lesquels je me pose encore la question : à quoi peuvent-ils bien servir, à part à tenter les onychophages de mon genre.

4 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Moi, j'ai rusé depuis longtemps : je ne mange plus mes ongles, mais la peau "autour"... C'est un tout petit peu moins moche, mais c'est affaire de goût. Et puis on ne peut pas toujours échapper à son atavisme : il parait que ma grand-mère faisait la même chose...

10:03 AM  
Anonymous Anonyme said...

Ah bah moi aussi j'ai arreté la rongerie d'ongles et c'est les petites peaux autour qui en font les frais... Petits saignements, douleurs, sensation de brulure quand la peau ne protège plus... Et j'ai tout essayé et rien n'y fait... Je persiste et signe!

10:42 AM  
Blogger Jean said...

Formidable ton texte!
nous avons bien ri.
Mon beau pére avait la même maladie ,
il a attendu d'avoir 70 ans pour en guérir !
Je te dis cela pour te remonter le moral.Ne desespere pas ....
Bises
Rosette

3:13 PM  
Anonymous Anonyme said...

Moi tout pareil, sauf que addict pendant 37 ans. J'ai du commencer le jour de ma première dent.
Truc bête, j'ai pris l'avion cet été, j'ai une trouille horrible de ce truc et donc j'ai invoqué un être supérieur en lui affirmant que si l'avion ne tombait pas j'arrêterai DEFINITIVEMENT de me ronger les ongles.
Et voilà, j'ai arrêté le 9 août et j'ai toujours pas craqué, car j'ai peur de l'être supérieur !!!!!!!
Peaudane.

2:03 PM  

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